Si 1 minute de rire équivaut à 10 de rameur, pas la peine de vous fatiguer puisqu’il y a le compte Instagram de Yugnat999. En quelques mois, ce génie du mème s’est fait remarquer avec ses commentaires mélangeant le français et l’anglais. J’ai voulu en savoir plus sur ce personnage à la perspicacité aiguisée. Rencontre parfumée à la Kronenbourg 7,2.
Il est difficile de passer à côté, mais pour ceux qui ignorent ce qu’est un mème, il peut prendre la forme d’une image, d’un son ou d’une vidéo avec lequel s’accompagne généralement un commentaire à visée humoristique. Les mèmes auront un impact plus ou moins viral sur les réseaux sociaux et ceux de Yugnat999 sont très suivis. Ce parisien a l’œil moqueur préfère rester discret sur son parcours. Il me confie simplement avoir étudié dans le domaine de la finance en concluant : “ça n’a rien à voir avec la personne que je suis. »
Tenir un tel compte occupe un temps considérable, il publie quotidiennement 5 à 20 mèmes. Une des forces de Yugnat999 (Tanguy) réside dans sa capacité à mettre en lumière les travers de la vie, les habitudes grotesques que nous avons tous. Avec un regard ironique sur la pop culture, l’actualité devient un puits sans fond d’inspiration : “En ce qui concerne l’inspiration, j’en ai toujours, je passe tellement de temps à tout checker, à chercher des images, à vivre des trucs au quotidien, à rencontrer des gens, à voir mes amis, à travailler, qu’en fait je me nourris de tout ça pour le transformer en contenu. Quand tu produis/créé sans contraintes et que c’est un plaisir il n’y a, a priori, pas de raison que tu ais des blocages.”
L’originalité de ses créations rassemble plus de 138 000 abonnés, le chiffre grimpe de semaine en semaine. Sur le fond, des thématiques reviennent assez souvent comme des références au milieu de la fête et aux drogues, aux personnalités du milieu artistique ou politique, bref, tout comportement peut être utilisable : “Alors c’est totalement addictif dans le sens où c’est devenu une habitude de tout voir à travers le prisme du second degré et de l’humour. J’ai énormément de mal à ne pas essayer de transposer n’importe quelle situation à un mème que je pourrais faire, que j’ai déjà vu passer, à un template. C’est devenu une “seconde nature”, donc je peux pas vraiment en avoir marre, mon personnage ainsi que les mèmes sont devenus une partie de ma vie, je peux pas vraiment me renier !”
Ce n’est plus un secret pour personne, aujourd’hui, chacun peut devenir connu en peu de temps, parfois même à son insu. Tanguy a fait le choix de se montrer dans ses stories et avec autant d’abonnés, forcément, il est reconnu dans la rue : “ c’est relativement fréquent, une ou deux fois par semaine je dirais. Le plus marrant, c’est quand ça m’arrive en dehors de Paris, dans des villes où je ne vais jamais d’habitude. C’est sympa quand je sens que la personne veut juste dire “cool ce que tu fais, continue” mais je suis beaucoup moins à l’aise quand j’ai l’impression d’être pris pour une “bête de foire”. Mon personnage internet c’est pas moi dans la vie de tous les jours.”
Or, il arrive que des personnes ne fassent pas la part des choses entre la personnalité réelle et virtuelle. La popularité attire les haters, il n’échappe à cette règle. Conscient de leurs mécanismes de gros cons frustrés, il les gère avec sagesse : “à partir du moment où tu as une visibilité, tu attires des gens qui n’aiment pas ce que tu fais, ce que tu es ou l’image qu’ils ont de toi. Et plus tu as de visibilité plus tu as des gens comme ça. En vrai, je passe le plus clair de mon temps à les ignorer car ils sont minoritaires et si tu commences à te focaliser dessus, tu vas vite déprimer. J’essaye surtout de me concentrer sur le positif et il y a beaucoup plus de gens qui ont une vibes positive donc ça m’encourage. De temps en temps, pour le kif je rentre dans le jeu de quelqu’un qui m’aime pas pour provoquer et faire rire, mais si je devais le faire à chaque fois je perdrais mon temps. Il faut aussi ne pas oublier que ces gens là cherchent aussi à attirer l’attention sur eux et à te faire commettre des impairs. L’ignorance ça fonctionne très bien pour le moment.” Ses mèmes montrent une belle aptitude pour la chute, il fait très bien de ne pas s’abaisser à la bêtise malsaine de quelques internautes.
Sa lucidité évidente nous mène à nous questionner sur la pérennité du mème, nous pouvons imaginer qu’un autre format humoristique prendra un jour le dessus. Si ce phénomène peut s’apparenter à une mode, il n’en demeure pas moins bien ancré dans nos esprits. A cette interrogation, il me répond : “Je sais pas, j’aimerai bien que ça dure longtemps. C’est toujours plus cool de se dire que ce qu’on aime faire et pour lequel on a du talent et bien ça va perdurer. Mais Internet c’est tellement fluctuant que je ne peux rien me garantir. »
N’imaginez pas que derrière le compte de Yugnat999 se cache un être arrogant, il est juste passionné par son activité et travaille comme un dingue pour amuser ses abonnés. Quand notre entretien se termine, il ajoute : “pour le moment ça marche, je fais le maximum pour ne pas me laisser enfermer et m’ouvrir des portes pour le futur, histoire que cette belle aventure ne soit pas une voie sans issue. » Cette dernière parole sonne comme la promesse d’une longue série de fous rires à venir.
Texte : François Gaugry
Photo : Yugnat999