Il est venu le temps pour Yarol Poupaud de prendre sa place sur le devant de la scène. En 1987, Yarol connaît un premier succès avec le groupe FFF qu’il fonde avec Marco Prince. Il s’en suit le power pop trio Mud et devient le guitariste et directeur musical de Johnny Hallyday en 2011. Musicien accompli, il ne s’arrête pas là. Il sort son premier album solo en février 2019, il a répondu à nos questions sur ce projet attendu.

La tournée a déjà commencé, comment est-elle accueillie par le public ?

On a pris le pari de partir en tournée avant la sortie de l’album, c’est un nouveau projet qui démarre. en fait je me suis retrouvé dans des salles avec des gens qui ont aimé FFF ou Johnny Hallyday, d’autres aiment la guitare et sont curieux. Pour certains, Ils ne savent pas du tout à quoi s’attendre. Mais je suis ravi, l’accueil se passe très très bien ! c’est-à- dire que les gens démarrent en étant un peu expectatifs avec les bras croisés en regardant ce qu’il se passe et à la fin du show tout le monde fait la fête et saute partout. J’ai l’impression que le bouche à oreille est en train de fonctionner parce que plus la tournée avance plus il y a de monde dans les salles.

Jouer en groupe comporte nécessairement son lot de concessions. Est-ce que cet album solo est l’album que vous aviez le plus envie de faire ?

C’est sûr que j’ai toujours eu envie de faire un album avec mon nom sur la pochette, je n’avais jamais eu vraiment l’occasion, c’est un déclic, c’est presque un hasard. On travaillait sur cet album sous le nom de Black minou, c’est tellement compliqué de gérer un groupe, au sein de celui-ci les membres changent tout le temps. J’ai mis beaucoup de moi-même dans la production des chansons, de leur écriture. Je me suis dit que l’album me ressemblait vraiment alors pourquoi ne pas l’appeler Yarol tout simplement. Je suis bien entouré, les musiciens qui m’accompagnent sont très importants et ont beaucoup participé à l’élaboration de cet album. Eux-mêmes ont des projets à côté, mon frère Melvil qui joue sur l’album est en ce moment en tournée avec Benjamin Biolay par exemple. Ces musiciens apportent de la fraîcheur. Il y a autour de ce projet solo une énergie de groupe.

Vous avez collaboré avec des artistes très différents comme Jupiter Bokondji du groupe Okwess, pourquoi ce choix ?

J’ai rencontré Jupiter à Kinshasa, j’y étais allé travailler il y a quelques années grâce à des amis cinéastes pour un documentaire sur la musique. Ils ont voulu me présenter ce musicien extraordinaire. En deux trois semaines, j’ai adoré l’énergie de la ville et des gens. J’ai pris une grande claque, j’ai appris énormément de choses à leur contact. Je suis très content parce que j’étais là la première fois qu’ils mettaient les pieds dans un studio, pour leur premier album et maintenant ça marche très bien, ils tournent dans le monde entier. Ça me fait très plaisir que ça se soit passé comme ça. Je suis un grand fan de musique africaine donc j’avais envie d’avoir cette couleur pour l’ouverture de l’album.

On vous connait guitariste, multi-instrumentiste, pas forcément chanteur (mis à part dans MUD), comment écrivez-vous vos textes ?

Dans les textes il y a plusieurs trucs différents, deux textes en français dont un a été écrit par Benjamin Biolay (Fan). Ça vient d’une envie d’être différent, de ne pas rentrer dans un moule. Être la personne qui fait tache. Une autre chanson de Corine ressemble à une manière de parler aux femmes et de leur dire qu’on les aime même si on est maladroit. Les autres textes ont été coécrit avec mon ami paddy Sherlock, ils parlent d’un constat de notre époque, sur notre manière de vivre. Je m’en suis rendu compte après, ces chansons ne sont pas très optimistes, elles parlent du monde qui nous entoure d’une manière sombre. Par contre, je suis plutôt optimiste en général alors il y a aussi des textes plus légers (Boogie with you), il y a une chanson qui est une déclaration d’amour à ma femme (Caroline).

J’essaie de lutter même si au fond de moi je ne suis pas toujours au top.

On vous voit sur scène avec un air de jubilation, vous paraissez avoir la joie facile, êtes-vous quelqu’un de profondément optimiste ? Comment êtes-vous en dehors de la scène ?

La joie facile, c’est bon ça ! (rires). Effectivement, j’ai une tendance à être comme ça. J’essaie de lutter même si au fond de moi je ne suis pas toujours au top. Je préfère voir le verre à moitié plein qu’à moitié vide et toujours essayer de tirer le mieux de ce qu’on peut m’offrir et ce que je peux avoir devant moi. J’ai tendance à rechercher le positif, d’être solaire. On a pas beaucoup de temps à passer sur cette terre. Je m’en rends compte. Profitons-en pleinement et essayons le plus possible d’être joyeux. On le voit en ce moment, les gens ne vont pas forcément tous bien. Mais si un concert peut aider à passer outre tout ça, c’est gagné. En Bretagne, récemment, une jeune femme dépitée est venue me voir à la fin du concert. Visiblement elle avait passé une journée de merde et elle m’a remercié pour ce moment qui lui a permis de l’oublier.

Nous sommes indéniablement dans une période où la musique électronique et le rap ont pris une grosse importance sur la scène musicale, ce n’est pas trop difficile de s’imposer avec du rock aujourd’hui ?

C’est sûr que pour le rock c’est pas une grande période, c’est pas mainstream en ce moment. Je me demande si le rock est une musique de masse ou non, il doit se remettre en question, reprendre des risques en trouvant une nouvelle énergie. Le rock et le succès commercial c’est compliqué, évidemment même avec les Beatles ou Elvis Presley. Il y a pleins d’albums à l’époque qui ne se sont pas vendus au départ. Les Velvet ont du vendre 500 albums à la sortie et il se trouve que les 500 mecs qui l’ont écouté ont monté un groupe après. Il y a encore une grosse cène rock et on espère que ça va grandir. La roue tourne, c’est un éternel recommencement.

Vous connaissez le succès depuis des années avec vos différentes formations musicales, est-ce que vous arrivez à garder l’esprit underground ?

En tout cas, j’essaye oui. Rien que de repartir à zéro avec ce projet, de me remettre à jouer dans des petits clubs, je suis hyper content. J’adore jouer dans les zéniths ou les grandes salles mais j’aime aussi le contact direct avec le public, les réactions directes à chaud. Sentir les gens, les toucher, les avoir piles devant moi, j’aime ce côté électrique et addictif. Je prends vraiment mon pied sur scène, j’ai l’impression de revivre mes débuts avec FFF où il se passait tous les soirs des trucs dingues. Après, je n’ai pas voulu faire un album underground, je veux qu’il plaise au plus grand nombre. Je n’ai pas voulu faire une musique élitiste ou de niche qui ne s’adresserait qu’à certaines personnes avec des codes précis.

Vous faites une tournée avant de sortir l’album, ce n’est pas si commun, est-ce que les concerts vous permettent de tester vos titres ? Est-il entièrement enregistré ?

Complètement, c’était une manière de les tester et on en était plutôt sûrs parce que je les avais déjà joués à Paris. C’est une manière de les faire découvrir aux gens dans leur plus simple appareil on va dire. Elles sont toutes enregistrées et on les joue de la même manière sur scène. J’aime beaucoup cet exercice risqué.

Dans le clip de votre single « Boogie with you », vous êtes en train de faire la fête après un concert, est-ce souvent le cas ? Vous avez besoin de retrouver du monde ?

Pas du tout, je sors de scène et je vais me coucher tout de suite (rires). Il y a des périodes de deux ou trois heures après des concerts où on se sent encore stone de ce qu’il vient de se passer. Soit on reste dans la salle boire un verre, soit on repasse à l’hôtel et on discute entre nous. Je ne vais pas dire que c’est comme un rail de coke mais quand on ressort de scène, on a la patate.

Ce clip a d’ailleurs été réalisé par Dimitri Coste qui avait travaillé avec Johnny…

C’est un vieux copain que j’avais présenté à Johnny, il est très talentueux, c’est un super photographe qui a deux passions : la musique et la moto. Il a beaucoup travaillé sur des pochettes d’albums et de clips. Il avait des points communs avec Johnny et ils se sont bien entendus. Quand il a été question de tourner mon premier clip, j’ai naturellement pensé à lui.

Ce n’est pas trop difficile de répondre à certaines questions sur la vie privée de Johnny ?

Tout ce qui ne concerne pas la musique, je ne réponds pas. J’ai adoré faire de la musique avec ce mec, c’était quelque chose d’extraordinaire, j’ai été ravi de travailler avec lui.

On vous sent assez à l’aise devant la caméra à travers les clips et vos petits rôles au cinéma, est-ce qu’on vous reverra bientôt ?

Pour l’instant, ce n’est pas d’actualité mais je ne suis absolument pas fermé, ce serait avec plaisir. C’est une histoire de rencontres, d’opportunités. Si je reçois un scénario intéressant pourquoi pas. Je ne vais pas courir après les castings ou trouver un agent parce que ça n’est pas mon métier. C’est l’occasion qui fait le larron.

Yarol va parcourir la France avec sa tournée, il sera notamment en concert à Blois au Chato’do ce samedi 8 décembre.

Texte : François Gaugry