Avant la crise de la quarantaine, il y a la déprise de la trentaine. Éric Metzger, plus connu pour ses sketchs avec Quentin Margot pour le Petit Journal que pour ses talents d’écrivain, mérite une meilleure attention sur cette deuxième facette. Son premier roman, La nuit des trente, parut en janvier 2015 et par « bienveillance » il décida d’interrompre sa promotion. Un an après la publication, le jeune auteur nous confie ses impressions.
Éric Metzger compte parmi les écrivains dont nous présumons l’existence par mondanité. En effet, dans l’imaginaire collectif, il y aurait deux sortes d’écrivains: l’isolé et le mondain. Le premier se doit de vivre dans sa grotte mystique à tout jamais et le second se montre aussi ivre de présences humaines que d’alcool. Il n’est pas aussi aisé de placer cet auteur dans une de ces catégories ridicules.
Détenteur d’un master de lettre à la Sorbonne, son parcours le prédestinait à l’écriture : «J’ai commencé à écrire à la fac, c’était un loisir. Au début il faut faire ses preuves et encore, je dois continuer d’apprendre. Ce que je fais avec le Petit Journal et mon activité littéraire n’ont rien en commun, c’est indépendant. Dans l’un je fais ce que je veux et l’autre c’est un travail. Il faut juste pouvoir trouver les moments pour écrire et c’est pas toujours facile».
Comme pour la plupart des auteurs qui utilisent l’auto-fiction , impossible de lire ces cent pages sans vouloir faire de liens entre Éric et son protagoniste : «Félix ne me ressemble actuellement plus. Par certains égards oui, dans son ivresse dans ses pensées. Mais contrairement au personnage, je ne suis pas aussi passif que ce qu’il dit, je suis moins dans le regret».
«J’aime beaucoup Stendhal et j’ai beaucoup appris en lisant Romain Gary qui avait une sorte d’écriture caméléon». Explique-t-il avec décontraction. Quoi qu’il semble dire, il le prononce avec un flegme naturel. «Ce roman était un dépucelage littéraire, je ne me considère pas comme arrivé. Tout ça se mesure à une œuvre, ça n’est que mon avis mais aujourd’hui on ne peut même plus parler de carrière littéraire».
Pour un premier roman, il est très réussi et brille par sa simplicité. Si Éric raconte le malaise d’un parisien qui boit et fait la fête pour se sortir du banal quotidien, Félix n’est pas l’incarnation d’un archétype que nous connaissons déjà trop. Il s’exprime avec pudeur sur le temps qui passe, sur les velléités des relations humaines.
«Je travaille sur mon deuxième roman, à mon rythme. J’ai très envie d’évoluer, de ne pas refaire les mêmes choses, les mêmes erreurs. En ce moment je lis d’autres auteurs, je veux tenir compte des reproches que certains m’ont fait». Et même si ce premier roman a été plutôt bien accueilli, «je vais essayer de faire en sorte qu’il soit plus drôle, moins cynique et moins dans la nuit…»
Lorsque je le questionne sur cette ambivalence entre le sérieux littéraire et l’humour à la télévision, il me répond avec évidence «Je serais idiot de ne pas l’assumer». L’un n’exclut pas l’autre, nous pouvons déjà nous réjouir de la prochaine parution de son deuxième livre. En attendant, La nuit des Trente pourra réconcilier les fâchés avec la littérature et les pressés effrayés par les pavés.
Texte : François Gaugry Photo : Gallimard/ L’ARPENTEUR