J’ai commencé le voyage énervé. Mon mal de tête était atroce, ayant mit deux heures à sortir du lit, trois à mourir sous la douche, j’étais en retard. Personne me connaissant ne sera surpris à la lecture de ces lignes – si quelqu’un les lis. L’un des premiers syndromes de la gueule-de-bois serait le pessimisme. On est en plein dedans. Tiraillé entre la faim et une envie de dégobiller, j’ai remercie une énième fois Monsieur Uber d’avoir permit à ma fainéantise d’attendre les sommets de son art. J’ai sauté à l’arrière d’une berline allemande du plus bel effet, un très bon tirage qui aurait pu présagé une embellie de ma journée, mais le premier freinage à rappelé à mon estomac et moi même que nous étions à l’aube d’un calvaire.

 

“ En raison d’un colis suspect présent sur les voies notre TGV 3980 sera retardé de 15 minutes “. Si vous habitez Paris en 2017, vous venez comme moi d’entendre ce message pour le 457ème fois. Je me fraye un chemin entre les voyageurs et les Famas des militaires pour atteindre le quai. Les 15 minutes de retard prévu au départ on finit par abattre l’espoir que le Doliprane tentait de faire apparaître. Je soupire. A la foi résigné mais fidèle à mes pulsions révolutionnaires, je tenais à marquer mon mécontentement. Je laisse les ébats (e)-scéniques à mes – vrais – camarade insoumis qui ont fait de la contestation un art que Internet aide à partager-aimer-commenter. La liberté d’expression si chère à notre institution est là pour propager les conneries de tout le monde. Les miennes en police Cambria taille 12 en ligne de mire. J’imagine que c’est ce que nous faisons tous. Par nous j’appelle a la barre les passagers du TGV 3980 retardé de 15 minutes.

 

Belle invention que ce TGV. Je n’inclue volontairement pas la carte et les prix du bar à bord. Moyen de transport de masse, il permet à ses utilisateurs – clients – de voyager d’un point A à un point B dans une vitesse record. Sur le papier c’est vrai que c’est alléchant. L’océan est accessible depuis Paris en trois heures, à peine plus pour la montagne. De quoi nous donner le sourire. Apparemment les gars on n’est pas courant, ou bien mettons nous à profit nos 15 minutes supplémentaires pour se lancer dans une joute tweetales. J’ai comme un doute… Autour de moi je vois un homme parlé à son téléphone en faisant les 100 pas, j’imagine qu’il est stressé par le retard engendré sur le diner qui se prépare avec sa petite amie (les gens ne se marient plus) une fois à destination. Je vois une assez jeune fille se prendre elle même en photo. Elle semble avoir un problème de bouche… Je suis encore dubitatif sur la couronne de fleur qui trône sur ses extensions. J’abandonne, j’ai mal au crâne, rappelez vous. Je vois un groupe, hétérogène. Ils ont tous la tête baissée, les pouces en action, tous sauf un. Nous approchons des 14 heures, il ne doit plus avoir de batterie. J’aurais pu venir lui parler, mais machinalement, j’ai sorti mon téléphone et soupiré une nouvelle fois.

 

Comme si je l’avais toujours su, mon billet était une première classe dans la prévision d’un voyage long et douloureux. Quelques jours auparavant je recevais un mail commercial de notre chère et tendre société ferroviaire, qui me soumettait l’idée de profiter d’un voyage en toute tranquillité à bord de leur service premier classe monnayant quelques euros de plus. Quelques euros de plus pour avoir la tranquillité ? J’achète. Raté. Les éléments semblaient se déchainer contre moi. Ma place est un quatuor, et je suis coté fenêtre. J’ai déjà bu 1 litre d’eau, ma vessie est sur le point de débordé et je suis prit dans les cordes par une femme qui semble tout aussi ravi que moi à l’idée de partager son voyage avec nous. Oui car un homme nous avait rejoint, un homme âgé qui ne devait pas être habitué à ce genre de voyage car il s’est assis en nous disant bonjour. C’est probablement ce qui m’a fait sortir mon ordinateur, probablement ce qui m’a empêché de regarder pour une énième fois le Seigneur des Anneaux, probablement ce qui m’a fait écrire pour la première fois depuis 6 mois.

 

Les images se sont mises à défiler devant mes yeux. Le message reçu hier à 20h « ca te dit une bière ? ». La photo vue sur Instagram qui m’a fait en boire trois quatre. Les Snapchats qui m’ont fait danser toute la nuit pour convaincre mes amis que je m’amusais plus qu’eux. L’actualité Facebook qui m’a fait resté au lit deux heures ce matin. Ma nouvelle playlist spotify qui m’a accompagné trois heures sous la douche. La banquette arrière du Uber qui m’a permit d’éviter tout effort. Et maintenant mon ordinateur qui fait effet de thérapeute.

 

Ces lignes ne sont pas une protestation mais une confession. Confession d’un membre de la génération Y qui partage un ami en commun avec tous le monde mais qui ne partage rien avec le monde. Internet m’a tué aurai je pu écrire en ligne rouge.